Ce que je voudrais dire aux autres mamans sur ces premiers mois difficiles
Oui, bon.
Je le savais. Évidemment que je le savais.
Car je savais tout.
Ma famille souriait face à mon ignorance, et je me demande aujourd’hui s’ils n’avaient en fait pas peur à ma place.
La dure réalité de la maternité
J’ai récemment été à une babyshower chez une amie. J’étais entourée de femmes qui gloussaient sur la maternité toute fraîche, le manque de sommeil et les envies de grossesse. Elles échangeaient des astuces sur la pommade pour les fesses rouges et les couvertures. Quelque part sous cette couche de discussions banales, de regards énamourés pour ces pyjamas adorables et ces autres cadeaux tout aussi mignons, il y avait la vérité, la dure réalité de la maternité.
J’ai ressenti que chaque maman présente, derrière ses cernes, ressentait ce que cela impliquait, elles avaient ressenti le poids de la maternité, mais elles le camouflaient derrière des cadeaux, des peluches et des félicitations. J’étais assise là, silencieuse, et tout ce que j’avais envie de faire, c’était de parler, encore et encore, de ce que peut être la maternité. Confier à mon amie enceinte tous les secrets de ce que ressent une maman.
J’avais tellement envie de préparer mon amie au raz de marée qui allait bientôt la submerger.
J’étais là aussi
J’étais à sa place il n’y a pas si longtemps, avec mon ventre rond. J’avais des applications de grossesse sur mon smartphone, des livres pleins d’infos, et mon Pinterest qui débordait de chambres de bébé parfaites. Les tétines tendance étaient prêtes, mon sac de maternité était prêt, le placard regorgeait de petites robes sublimes que mon bébé ne porterait sans doute jamais. Nous avons visité la maternité. J’ai lu des récits d’accouchements sur le net. J’ai appris comment ma respiration pouvait aider bébé à sortir. Je mangeais de l’ananas, dans l’espoir de déclencher le travail.
J’étais prête.
J’ai pourtant l’impression qu’avant qu’elle arrive, cela a pris des années. Dans la pratique, cela a duré 41 semaines et un jour. Ces 8 jours supplémentaires m’ont permis d’être encore plus prête. Je me souviens de l’extase à l’hôpital après avoir reçu ma péridurale.
Ca y était enfin, et j’étais tellement prête.
Mais oh, attendez un peu.
Je n’étais pas prête.
C’est tellement dur.
Je suis tellement fatiguée.
Pourquoi est-ce que personne ne m’a rien dit ?
Je. Ne. Sais. Rien.
Ce que j’aurais voulu lui dire
Si je pouvais me retrouver face à cette version passionnée et naïve de moi enceinte, je voudrais lui dire ceci:
L’amour que tu t’apprêtes à ressentir n’a rien de comparable avec tout ce que tu as déjà ressenti. Ce sera à la fois étrange et connu. Ton cœur empli d’amour sera sur le point d’exploser. Un tel amour est toutefois lourd à porter. En dehors de toutes proportions. Un peu comme si tu te brisais en deux tellement c’est lourd. Tu ne sentiras plus la différence entre épuisement et dépression, et les ténèbres envahiront parfois ce qui devraient être les plus beaux moments de ta vie.
Ton bébé va pleurer. Souvent. Tes journées commenceront et termineront avec ces pleurs. Ton corps y réagira de la façon dont il a été programmé pour cela : en panique. Tu rechercheras les choses les plus étranges sur Google. Et tu auras l’impression de ne jamais en faire assez. Tu n’en feras jamais assez.
Ton bébé fera des siestes éclair de 10 minutes. Quand tu seras assise sur une chaise inconfortable. (N’accepte aucune chaise inconfortable chez toi.) Dans la salle de bains. Pendant que l’eau du bain coule.
Tu auras l’impression de devenir folle, jour après jour, seule. Seule dans cette salle de bains, entre le bruit de l’eau qui coule et celui des pleurs, tu auras l’impression que tes nerfs sont irrémédiablement endommagés.
T’ai-je déjà dit combien tu te sentiras épuisée?
Manger, dormir et prendre ta douche ne seront plus des priorités, et à ce moment-là, tu auras l’impression que cette phase ne se terminera jamais. Alors que d’autres nouveaux nés semblent dormir paisiblement dans une jolie gigoteuse sur Instagram, tu as l’impression que le tien est malheureux. Il y a plus de deux milliards de mères sur cette terre, et pourtant, tu te sentiras seule. Et si tu te compares à toutes ces autres mères, tu auras l’impression d’échouer. Peu importe les mains qui se tendent pour te venir en aide, tu auras l’impression d’être abandonnée.
Cet amour anéantira ton ego. Détruira ta capacité à te faire confiance. Et l’angoisse inévitablement liée à cet amour te paralysera. Des gens que tu ne connais pas diront que ton bébé est difficile. Ta famille, tes amis te diront que tu lui consacres bien trop d’attention. (Pour info, un bébé ne sait pas être difficile, et n’a jamais trop d’attention.) Tu te sentiras coupable parce que tu auras l’impression de ne pas y arriver. Tu te sentiras coupable de te sentir coupable. Tu te sentiras coupable de te sentir coupable d’être coupable.
Tu pleureras pour des choses absurdes, par exemple de ne plus être enceinte. Mais aussi pour des choses plus terre à terre, comme la façon dont la grossesse a modifié ton corps. Tu auras peut-être l’impression que tu ne maîtriseras jamais cet amour que tu dois porter.
Mais cela s’améliore
Et si je te disais qu’un jour, ton bébé va sourire? Et même rire aux éclats? Et que tu feras de même? Tu trouveras une réponse à toutes tes questions. Les pleurs s’atténueront.
Et si je te disais que les choses s’améliorent? Oh oui, elles s’améliorent. Ton bébé va trouver son rythme, mieux manger, et mieux dormir. Je pourrais te dire que tu trouveras de l’espoir dans les yeux de ton fils ou de ta fille. Que quand ses yeux s’illuminent, le poids qui accable tes épaules sera plus léger.
Peut-être ne saisiras-tu jamais la parentalité à 100 %, mais un jour, tu trouveras une façon de t’envelopper de cet amour, plutôt que de le laisser te submerger.
Et même si cela semble difficile à croire, un jour, tu auras un petit enfant plein de vie, futé et incroyablement heureux. Un enfant que le monde entier adore. Tes cheveux seront propres, tu auras le temps de prendre un petit-déjeuner.
Si, promis.
N’oublie pas cela. Un jour, tu t’étonneras du fait que cet enfant qui rit aux éclats était ce bébé qui pleurait autrefois.
Tu vas aller mieux. Tu vas grandir. Tu vas t’adapter, trouver ta place, et t’adapter encore. Selon moi, c’est précisément ça, la maternité. Trouver des façons d’ouvrir ton cœur toujours plus, à toujours plus d’amour. Tu apprendras à trouver l’équilibrer entre ce qui est bon et ce qui est lourd.
Et s’il te plaît, accepte que les choses ne puissent pas toujours être terminées. C’est bon comme ça. C’est assez.
C’est bon.
C’est bon.
C’est bon.
Oublie ce que tu vois sur Instagram.
Tu es une maman fantastique.